Structure d’accueil du projet
Au démarrage du projet, l’école secondaire Henri Dunant comprend quatre implantations propose des sections professionnalisantes telles que horticulture, cuisine, vente, services sociaux… ainsi qu’un CEFA. Elle comptait 70% d’élèves belges mais, quelle que soit leur origine nationale, la plupart des familles sont fragiles socialement et un bon nombre de parents maîtrisent eux-mêmes mal l’écriture et la lecture.
Constats et ressources de départ
Les professeurs constatent un illettrisme important : les enfants et leurs parents ont des difficultés importantes de lecture et d’écriture même s’ils sont ici majoritairement d’origine belge. Cette situation entraîne une distance et une incompréhension entre les acteurs tandis que les élèves ne trouvent pas sens à leurs apprentissages. Deux professeurs motivés dont un professeur d’alphabétisation ont cherché des moyens de casser ce déterminisme et de développer d’autres pédagogies plus adaptées. Le promoteur principal de projet se forme à cette période de façon approfondie à des techniques spécifiques, y compris d’évaluation des capacités et lacunes en lecture (FUNOC, formation « lire et écrire », familiarisation à la pédagogie active…).
Objectifs et concrétisation du projet
Le projet ciblait l’augmentation des compétences scolaires et sociales au travers de l’implication des parents et des élèves du premier degré (donc âgés entre 12 et 14 ans et débutant leur cursus scolaire dans l’établissement), cela en commençant par la 1ère B, puis le second degré (étape importante et difficile du développement adolescent).
Le cœur central du projet résidait dans la préparation et l’édition du journal d’école à intervalles réguliers. Il visait en premier lieu à faire comprendre l’utilité de la lecture et de l’écriture et à faciliter la communication entre les acteurs. Il a paru plusieurs fois et comprenait des productions individuelles et collectives d’élèves ainsi que des articles de certains professeurs. Outre le but d’intéresser et d’impliquer les enfants, le but était de les aider à mieux s’écouter, de souder l’équipe éducative, d’impliquer les parents.
Le projet d’alphabétisation quant à lui concernait de manière centrale les élèves du premier degré d’enseignementet alliait un volet de soutien individuel et collectif.
D’un côté, l’achat de matériel informatique (ordinateurs et programmes de remédiation) visait des apprentissages personnalisés. Une dizaine d’enfants des différents sites de l’école ont ainsi été pris en charge de manière spécifique deux heures par semaine. On misait sur le fait que changer les méthodes devrait leur faire faire des progrès en lecture et écriture, notamment le fait d’impliquer ces élèves activement dans toutes les étapes de réalisation du « Journal Interactif ».
D’un autre côté, une politique d’incitation à lire et à écrire s’est mise en place au sein et au départ des classes. Les livres achetés et mis à disposition des élèves ont un lien avec les sujets traités en classe et collent au vécu des élèves. Un autre outil – le Défi lecture- est utilisé à un moment avec la collaboration de la bibliothèque de Charleroi. Des animations se font par demi-groupes de classe qui doivent se lancer des défis concernant la lecture qu’ils ont en commun. Les questions sont rédigées par chaque équipe, tapées à l’ordinateur puis envoyées à l’autre équipe qui y répond et vice versa. Les élèves mordent particulièrement à cette activité et à ce jeu. Des revues comme Okapi ont également été mises à disposition pendant les études et les garderies. On a initié des moments de lecture collective dans certaines classes. Chaque élève a reçu l’exemplaire d’un livre lu en classe, cadeau apprécié par les jeunes. Le but de ces actions était également de permettre aux jeunes de dépasser leur vision étroite des choses, leurs préjugés.
La correspondance mise en place avec certaines classes de Louisiane et du Mali, participait à ce mouvement d’ouverture interculturelle et d’acceptation mutuelle entre les enfants issus de différentes parties du monde. En ont découlé l’envie et la nécessité d’organiser des événements (expos, repas…) qui font découvrir les différentes cultures. Outre la correspondance avec le Mali, des échanges d’objets ont été effectués (djembés contre matériel informatique de récupération et remis en état de marche). Cet échange a eu lieu lors de la visite du directeur de l’école malienne en Belgique. Le fait que le promoteur principal de projet connaissait bien l’Afrique (ayant épousé une personne de cette origine) a permis un mouvement d’ouverture sur l’Afrique et des activités où les jeunes ont pu développer leur créativité. Ainsi, un professeur de danses et rythmes africains a été engagé pour animer des ateliers « djembé » avec les différentes classes. Le projet de départ s’est aussi progressivement étendu à plus de jeunes. Les différentes fêtes et spectacles qui ont été produits ont impliqué d’autres élèves des cours de couture, de cuisine ou encore de graphisme dont le travail a été mis en valeur. La section ‘ carrosserie’ reconnue difficile à gérer a de son côté retapé un vieux car permettant excursions et voyages. Toutes ces initiatives visaient à combattre l’ennui à l’école, à créer une envie d’apprendre, cela en valorisant les élèves, en les aidant à mûrir intérieurement.
Progrès réalisés – points forts du projet
Une approche plus individualisante des apprentissages ont remotivé les élèves en grande difficulté sur le moment.
La plupart des enfants ont largement mordu aux activités de découverte proposées, notamment via les lectures collectives, les activités ‘conte’ ou encore ateliers d’écriture. Certain.e.s élèves ont pu trouver les conditions de sécurité personnelles leur permettant de témoigner de leurs expériences et difficultés. Cfr http://www.culture-enseignement.cfwb.be/index.php?id=2471
Les retombées ont été décrites comme visibles au niveau de la lutte contre les préjugés. Par exemple, l’invitation d’un jeune chanteur à l’apparence quelque peu marginale et aux chansons engagées dans les classes a fait mouche alors qu’elle aurait été peu envisageable avant. Les différentes actions menées avec les élèves ont manifestement donné du plaisir, de la valorisation et de la confiance en soi à ces derniers ainsi que du sens aux apprentissages. Des professeurs ont rejoint le groupe ‘pilote’ : ils ont donné de leur temps et en ont tiré satisfaction. Il a été possible de mobiliser des parents d’origine étrangère pour organiser des repas ‘ethniques’ par exemple.
Les premiers numéros du journal d’école ont été rédigés dans l’enthousiasme et l’initiative a été bien reçue par tous. Le journal distribué à cinq cents exemplaires diffusait des informations utiles en matière de santé ; des mots fléchés ont été inventés par les élèves qui en étaient fiers ; on y trouvait aussi des mini-reportages qui ont enthousiasmé jeunes et adultes.
Effets positifs non attendus
Des collaborations se sont développées avec certaines ASBL d’alphabétisation, le but étant d’accélérer les acquis linguistiques de certains élèves (appel à des associations extérieures et complémentaires à l’école). Une initiative en a appelé une autre. La créativité s’est invitée et de nouvelles idées ont fusé.
Difficultés et résistances
Les conditions de stabilité du projet n’étaient pas garanties ni réunies. Les professeurs changeaient continuellement de site, y compris les professeurs qui ont eu l’idée du projet et s’y sont investis ; même le promoteur est parti une année scolaire avant de revenir dans l’établissement. Celui-ci a dû porter le projet sans un appui assez significatif de ses collègues ni de la direction probablement débordée de devoir gérer le quotidien d’autant d’implantations scolaires différentes. Au départ, une bonne partie des enseignants se montraient très frileux et même si, au fur et à mesure, une partie d’entre eux se sont rendus compte des bénéfices que chaque acteur scolaire peut retirer du projet, la dynamique enclenchée n’a pas suffi, s’est vite essoufflée. Les activités du projet ont pris trop d’extension par rapport aux ressources disponibles. Le processus d’écriture du journal était trop complexe pour les enfants ciblés par le projet, trop lent pour les garder mobilisés, intéressés. Il s’est avéré prématuré de vouloir impliquer les parents sans avoir préalablement amorcé d’autres changements. Les nouveaux outils d’enseignement/apprentissage n’ont pu résoudre les carences en écriture et lecture sur une si courte période et au vu de l’ampleur des facteurs économiques, culturels et sociaux défavorables, ce qui a entretenu le pessimisme du corps enseignant.
Poursuite, devenir du projet
Le centre scolaire a fait l’objet d’une restructuration et a été renommé récemment CECS LA GARENNE. Le projet de la Fondation en tant que tel a été arrêté à la fin de la période d’aide de la Fondation. Cependant, la bibliothèque scolaire de La Garenne a pris le relais d’une série d’activités d’incitation à lecture et à l’écriture en lien avec les professeurs. Pour répondre aux besoins de recherches scolaires, couvrant tous les domaines du savoir et des loisirs, plus de 6000 livres, revues et journaux sont à la disposition des élèves et des professeurs. Les horaires d’ouverture de la bibliothèque sont larges. Des ateliers d’écriture, rencontres littéraires, expositions de travaux d’élèves y sont régulièrement organisés. De plus, le projet a contribué au changement de culture au sein de l’établissement et a encouragé certains professeurs à utiliser davantage des méthodes actives, à travailler à plusieurs à la réalisation de projets pédagogiques impliquant plusieurs classes, à collaborer avec le monde culturel et artistique notamment.
Contact
CECS Henri Dunant
rue de Lodelinsart 200
6000 Charleroi
Tel : 071/86 24 00
Promoteur du projet : Jean-Pierre Marichal